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ROSA BONHEUR
Rosa Bonheur (1822-1899)
Dossier réalisé par Paul de Haut
Accès direct à la galerie virtuelle de ROSA.
Née le 16 mai 1822 au 29 de la rue Saint-Jean à SAINT-SEURIN (aujourd'hui, 55 rue Duranteau à Bordeaux), Marie Rosalie, dite : Rosa est l'aînée de Raymond Bonheur et de Sophie Marquis. Son père était peintre et sera d'ailleurs son seul professeur (les écoles d'art de cette époque étaient fermées aux filles). Sa grand-mère arrive au domaine de Quinsac en 1799 en tant que nourrice, avec Sophie née à Altona en 1797 (près de Hambourg), de père inconnu. Elle est adoptée par Jean-BaptisteDublan de Lahet, commerçant bordelais. Le mystère de ses origines, loin d'être un handicap, fait rêver Rosa que sa mère était de sang royal.
Grâce à son tuteur, plutôt fortuné, sa mère avait bénéficié d'une excellente éducation ; elle eut un maître à danser, à chanter, de musique et plus tard, un professeur de dessin, très beau garçon dont elle ne tarda pas à tomber amoureuse : Raymond Bonheur. C'est un homme bon, rêveur, modeste, issu d'une famille de cuisiniers toulousains. Monsieur Dublan rêvait d'un meilleur parti pour sa pupille, mais il finit par autoriser cette union.
Elle eut d'abord deux frères, Auguste et Isidore avec lesquels elle partagea une enfance heureuse entre la ville et le Château Grimont, à Quinsac où elle faisait de longs séjours. Sa mère enseignait la musique, son père le dessin. La virilité précoce de son tempérament s'y exprimait déjà ; véritable garçon manqué, elle suivait à la chasse les fils de Monsieur Dublan et n'hésitait pas à se bagarrer avec ses camarades. Elle évoque à plusieurs reprises cette période : "J'étais le plus garçon de tous". "Je vois encore l'empressement avec lequel je courais au pré où l'on menait paître les boeufs. Ils ont failli me corner bien des fois, ne se doutant pas que la petite fille qu'ils poursuivaient devait passer sa vie à faire admirer la beauté de leur pelage ". "J'avais pour les étables un goût plus irrésistible que jamais courtisan pour les antichambres royales ou impériales. Vous ne sauriez vous douter du plaisir que j'éprouvais de me sentir lécher la tête par quelque excellente vache que l'on était en train de traire".
Mais la famille déménage pour Paris, où en 1830, Juliette sa petite soeur vient compléter la famille. C'est la même année qu'elle apprend, à l'occasion de la mort de M. Dublan de Lahet, qu'il était en fait son vrai grand-père !
A partir de là, c'est sa mère qui prend en charge la famille, avant de décéder en 1833 et d'être, faute d'argent enterrée dans la fosse commune de Montmartre ! Elevée au milieu d'artistes, à 13 ans, Rosa décide, contre l'avis de son père, de mettre fin à ses études et de se consacrer au dessin, elle quitta malgré tout l'école, puis bientôt l'atelier où elle était apprentie et finit par convaincre son père qui lui dispense ses premières leçons de peinture, avant de confier son talent à l'atelier Cogniet.
Palette (Minneapolis Institute of Art)
Elle passe alors ses jours à arpenter les galeries du Louvre, dont elle avait obtenu l'autorisation de copier les oeuvres qui lui plaisait. En parallèle, Rosa faisait ses premières études de paysages au bois de Boulogne.
Son père est plus idéaliste qu'homme d'argent ! A Paris, il a découvert Saint-Simon et fait partie des premiers adeptes de la religion du père Prosper Enfantin. En 1834, il embrasse une nouvelle cause, celle des Chevaliers du Temple. Rosa sera peu après intronisée chevalière.
Sans revenir sur les mouvements utopistes de l'époque, il faut noter que Saint-Simon comme Fourier prêchaient l'émancipation des femmes et que ce climat de pensée imprégna très tôt le foyer des Bonheur. De même, en lui lisant Lamennais, son père, l'aide à croire en l'existence d'une âme chez les animaux, ce qui se traduira dans toutes ses toiles par une extrême attention portée au regard des bêtes, et les lui fera préférer à tout autre motif de son art.
Rosa en Costume de Grand Croix (ordre des Templiers)
En 1837, Raymond Bonheur reçoit la commande d'un M. Micas qui souhaite un portrait de sa fille Nathalie, poitrinaire, dont il pense qu'elle va bientôt mourir. Coup de foudre entre les deux fillettes : Rosa a 14 ans, Nathalie en a 12 ; elles ne seront finalement séparées que par la mort de Nathalie en 1889.
Nathalie Micas et Rosa à Nice en 1882
Après la mort de son « Beau-père » et de son père, en 1849, Rosa Bonheur prend la direction de son école d'art ; c'est entre 1848 et 1852, qu'elle passa de longs séjours dans la Nièvre, au Château de la Cave, sur la commune de Beaumont Sardolles.
« Mam'zelle Rosa » comme l'appelaient les gens du pays, les séduisit vite par sa grâce, sa vivacité, sa simplicité et l'intérêt qu'elle portait au monde paysan.
En 1859, Rosa va prendre ses distances avec sa propre fratrie et vivre désormais avec Mme. Micas mère et Nathalie, dans une vaste demeure en lisière de la forêt de Fontainebleau, à By, en haut de Thomery.
Elle y fait aménager son atelier et y loge ses chers animaux, mouflons, cerfs, biches, sangliers, moutons, chevaux, boeufs, chiens, et même un couple de lions, le mâle en cage, la femelle « Fatma » en liberté.
Rosa Bonheur et sa lionne : Fatma
Son Altesse, chez elle - 1885
(Mineapolis Institute of Arts)
Transgressant les interdits liés à la morale de son époque, elle eut pourtant l'habileté de mener une vie à contre-courant de bien des conventions sans jamais faire scandale. En développant dans son art, une approche académique alors même que les femmes n'étaient pas admises au Conservatoire. Son directeur déclarait à son sujet : "Mademoiselle Bonheur, nous saluons en vous un lauréat
de première classe". Cette reconnaissance lui permit plus de liberté, et malgré ses différences, sa carrière artistique fut glorieuse et jalonnée de prix et d'honneurs, suscitant envers elle l'intérêt de la critique.
Portrait de Rosa en 1871
Photographiée par André Adolphe Eugène Georges Disdéri (Fine Arts Museum de San Francisco)
Jusqu'au XVIIe siècle, les femmes trop "excentriques" étaient considérées comme des sorcières et condamnées au bûcher ou plus simplement internées. Sa tenue et ses façons ont fait l'objet de beaucoup de commentaires : elle portait les cheveux courts, s'habillait de vêtements masculins - c'est à dire de pantalons, qu'elle ne pouvait mettre sans un permis de police (accordé curieusement pour raisons de santé et contresigné par son médecin) renouvelable tous les six mois (à dater de 1852)
Rosa à By
Rosa fumait comme un sapeur et appréciait les « Havanes », montait à cheval comme un garçon et non pas en amazone. Une de ses amies racontait "Des images me frappèrent : une photographie d'elle fumant une cigarette à son bureau, le fac-similé d'une permission de travestissement, deux reproductions de tableaux, Buffalo Bill sur son cheval et un marché aux chevaux." En effet, le fait de se comporter et de s'habiller véritablement en homme, lui a ouvert des horizons plus vastes. Afin de mieux étudier les animaux et perfectionner ses connaissances anatomiques, Rosa Bonheur assistait aux foires aux bestiaux, n'hésitant pas à visiter les abattoirs, ou à disséquer des carcasses qu'elle achetait chez son boucher - ce qui justifiait pour elle le port du pantalon ! Elle affirmait : "Quel ennui d'être limité dans ses gestes quand on est une fille !"
Vaches
Nombre d'excentriques étaient homosexuels ; sa sexualité allait dans le sens de ses choix vestimentaires : Elle partagea sa vie affective avec deux femmes peintres, Nathalie Micas puis après le décès de celle-ci en 1889, Anna Klumpke, une américaine.
Même si elle a transgressé la morale sociale de l'époque, cela n'a pas empêché Rosa Bonheur d'être célébrée dans toute la France, en Grande-Bretagne et en Amérique où elle était même considérée comme "la plus grand peintre animalière du monde".
Rosa fut, l'un des premiers membres de la SPA (Société Protectrice des Animaux).
Lapins - 1840
Musée des Beaux Arts de Bordeaux
Réussissant très tôt à s'imposer, à force de talent et de travail, elle fut sans doute la plus célèbre des femmes du XIX° siècle, à s'intéresser à la peinture animalière. Admise à exposer au Salon de Paris de 1841, à seulement 19 ans, avec deux tableaux : "Moutons" et "Chèvres et Lapins". En 1843, à côté d'une toile : "Les Chevaux à l'Abreuvoir", elle exposa une sculpture en plâtre intitulée : "Taureau". Au salon de 1848 elle obtînt une médaille d'or.
Elle peignait comme elle vivait, puissamment.
Déjà célèbre outre-Atlantique, les commandes affluaient. Rosa se permettait même d'en refuser, fidèle à son caractère indépendant, ne peignant que ce qui lui plaisait : "Il me suffisait de terminer une étude, n'importe laquelle, et mon tiroir se remplissait d'or", confiera-t-elle plus tard à Anna Klumpke.
Moutons dans les Highlands - 1857
Huile sur toile, 46 × 65 cm. The Wallace Collection, Londres.
Proche des artistes de l'école de Barbizon, Rosa Bonheur est, avec Constant Troyon, l'une des principaux* peintres animaliers français du milieu du siècle. Ces Moutons inspiré de la tradition hollandaise, témoignent de l'intérêt du peintre pour le naturalisme et le retour à la terre.
(*) Emploi du masculin volontaire, car le fait d'employer le féminin sous-entendrait "parmi les femmes peintres" qui étaient peu nombreuses à cette époque, ce qui serait limitatif sur son rayonnement réel...
Moutons sur mer - 1865
National Museum of Women in the Arts - Washington
La commande par l'Etat pour 3.000 francs, d'une scène de labourage : "Le Labourage Nivernais", exposé au Musée d'Orsay, fut sa première oeuvre importante, un défi et un triomphe : ses grandes dimensions (1,34 m x 2,60 m), furent jugées exorbitantes de la part d'une femme, ne mesurant qu'un mètre cinquante ! Ce chant d'amour à la nature innocente (contre la ville corrompue) lui vaudra à la fois un prix et d'être associée à George Sand. Il l'impose magistralement au Salon de 1849, à 27 ans.
Labourage Nivernais - 1849
(The John & Mable Ringing Museum of Art)
Le tableau ayant établi la célébrité de Rosa a été peint sur la commune de Beaumont Sardolles, dans un champ de la ferme : "La Mare". Il apporte la preuve de l'implantation du Charolais dans la Nièvre en 1849 : sur les douze boeufs des 2 attelages, neuf au moins sont de robe blanche. Les boeufs roux sont vraisemblablement de race morvandelle, aujourd'hui disparue.
Quatre ans plus tard, Le Marché aux chevaux, sera encore plus grand (2,44 m x 5,06 m), et remportera un succès international, malgré les réserves de la critique parisienne. Rosa voyage en Angleterre avec sa toile et séduit ses interlocuteurs par ses manières originales mais agréables. Elle a maintenant ses marchands, un public international, et assez d'argent, pour continuer à faire ce quelle aime : célébrer les animaux et décrire dans son style réaliste les travaux des champs et la vie rurale en France.
Citoyens des Highlands
En 1864, l'impératrice Eugénie lui rend une visite impromptue à By, puis l'invite à déjeuner avec l'Empereur Napoléon III, au château de Fontainebleau. L'année suivante, en 1865, l'impératrice revient à By la décorer elle-même au rang de Grand Croix de la Légion d'Honneur, distinction alors très exceptionnellement accordée à une femme, et déclare : « Vous voilà Chevalier, je suis heureuse d'être la marraine de la première femme artiste qui reçoive cette haute distinction ».
Elle fut aussi la première femme à être élevée au grade d'Officier en 1894, sous la III° République.
le Marché aux chevaux (1853-1855)
Exposé au Metropolitan Museum de New-York
Symbolisant la force animale, ce tableau dépeint des percherons, difficilement maintenus par de jeunes paysans. Inspirés des oeuvres de Coysevox ou de Géricault, les chevaux sont traités de façon naturaliste à travers un rendu réaliste des mouvements et des détails anatomiques. Ce tableau est l'aboutissement des études effectuées par l'artiste pendant plus d'un an dans les écuries et les marchés aux bestiaux de la région parisienne. Ce tableau exposé en 1853, reçut un accueil triomphal de la part de la critique et fut largement diffusé grâce à la gravure.
Foire aux chevaux - Une variante du tableau précédent
Metropolitan Museum of Peinture
En 1887, elle peint « Sevrage des veaux » (Metropolitan Museum de New-York).
En 1889, peu après la mort de Nathalie Micas, le Colonel Cody, le légendaire "Buffalo Bill", de passage en France avec ses cow-boys et des Indiens, pour l'Exposition universelle, vient la voir à By. C'est un fervent supporter du vote des femmes. Il veut connaître la petite "frenchy" qui décrit si bien ses grands espaces. A cette occasion, Rosa se fait l'avocat des Indiens : "J'ai une passion véritable pour cette race infortunée, appelée à disparaître devant les Blancs usurpateurs..." A l'issu de sa visite, Buffalo Bill lui offre un magnifique costume sioux, un arc et des flèches.
Le Colonnel Cody
(dit : Buffalo Bill) 1889
Rosa Bonheur
Portrait par Consuela Fould, Marquise de Grasse
C'est grâce aux comptes-rendus de cette rencontre très commentée par la presse, qu'Anna Klumpke, jeune artiste peintre américaine tombée sous son charme, trouva le moyen d'approcher Rosa comme interprète d'un éleveur de chevaux du Wyoming qui souhaite la féliciter pour son soutien à la race percheronne... L'éleveur parti, Anna Klumpke, définitivement séduite par la petite dame énergique, resta auprès d'elle pendant dix ans, jusqu'à sa mort en 1899, laissant une ultime toile inachevée représentant des chevaux. Rosa en fera sa légataire universelle.
Rosa et Anna Klumpke
Un musée lui sera dédié au Château de Fontainebleau en 1920, et ses oeuvres seront sculptées ou lithographiées par de nombreux artistes connus.
Même le Bulletin paroissial de Saint-Benin d'Azy vantera ses mérites en 1973.
Une plaque, rappelant que Rosa Bonheur y descendait lors de ses séjours, sera apposée en 1929 sur l'ancien relais de Poste de Maison Rouge, à l'initiative de son grand spécialiste local : Louis Mathieu Poussereau et disparut lors de la démolition du bâtiment en 1970.
Outre le parc de la Mairie de St-Benin d'Azy, et sa maison-musée du Château de By, ou l'on peut visiter son atelier (adresse : 12, Rue Rosa Bonheur - 77810 Thomery) un collège porte désormais son nom au Châtelet en Brie (77820).
Permission de travestissement accordée à Rosa Bonheur
" Paris, le 12 Mai 1852 Nous, Préfet de Police, [...] Autorisons la demoiselle Rosa Bonheur demeurant à Paris, rue ... n° 320 à s'habiller en homme ; pour raison de santé sans qu'elle puisse, sous ce travestissement, paraître aux spectacles, bals et autres lieux de réunion ouverts au public. La présente autorisation n'est valable que six mois, à compter de ce jour. "
Bibliographie
"Rosa Bonheur en Nivernais" de Louis Mathieu Poussereau
(Imprimerie Roslay à Vincennes - en 1925)
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